Sujet: Asie-Pacifique : guerre froide Ven 11 Jan 2013 - 16:12
Les Etats-Unis veulent-ils construire une nouvelle structure de guerre froide en Asie ?
( le Quotidien du Peuple en ligne ) - 11.01.2013 à 09h32
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La situation dans la région Asie-Pacifique est depuis longtemps déjà un sujet sensible. Récemment, les relations bilatérales et multilatérales sino-japonaises, sino-américaines, américano-japonaises, sino-américano-japonaises, entre les deux Corées se sont montrées sensibles et complexes, et la situation en Asie-Pacifique est devenue de plus en plus délicate. Comment peut-on considérer la situation actuelle dans la région Asie-Pacifique?
La région Asie-Pacifique est aujourd'hui devenue le centre de gravité géopolitique du monde.
Dans les temps modernes, le centre de gravité géopolitique du monde s'est d'abord situé en Europe et plus tard en Europe et aux États-Unis. Ce sont la Première Guerre mondiale et la Seconde Guerre mondiale qui ont dessiné l'aspect de base du monde actuel, qui a pour l'essentiel été décidé par le modèle stratégique élaboré par les grandes puissances européennes. Pendant la Guerre Froide, les États-Unis ont non seulement réussi à faire chuter leur seul adversaire pour l'hégémonie mondiale, l'Union Soviétique, mais aussi maintenu un contrôle ferme sur l'Europe. Lors de la première décennie après la fin de la guerre froide, dans les années 1990, l'orientation stratégique des États-Unis s'est encore concentrée sur l'Europe. Lors de la deuxième décennie après la fin de la guerre froide, donc lors de la première décennie du 21e siècle, l'orientation stratégique des Etats-Unis s'est concentrée sur l'Asie centrale, en particulier le Moyen-Orient.
A compter du début de la deuxième décennie du 21e siècle, les Etats-Unis ont à nouveau modifié leur orientation stratégique mondiale, vers la région Asie-Pacifique cette fois. Le contexte actuel montre que les Etats-Unis ont clairement fait savoir à la Chine qu'elle était leur principal rival pour l'hégémonie mondiale. Que les États-Unis considèrent la Chine comme un grand rival est en pleine conformité avec leur logique hégémonique. La Chine est en effet le seul pays en mesure de construire un rapport de concurrence avec les États-Unis dans tous les domaines après l'effondrement de l'Union Soviétique.
Il faut bien comprendre cependant que les gains et les pertes dans la région Asie-Pacifique ne concerneront pas seulement la Chine et les Etats-Unis, mais qu'ils auront aussi un impact important sur les perspectives de développement et le statut international de nombreux pays. Avec l'importance croissante de la région Asie-Pacifique, en plein essor, le centre de gravité géopolitique mondiale va passer de plus en plus clairement de l'Europe et des États-Unis vers la région Asie-Pacifique.
La région Asie-Pacifique est le principal champ de bataille des Etats-Unis pour contester la montée en puissance géopolitique de la Chine. Les Etats-Unis sont aujourd'hui pleinement engagés dans la construction d'une nouvelle situation géopolitique de guerre froide dans la région Asie-Pacifique. Mais en plus de renforcer les anciennes alliances militaires, les efforts des États-Unis présentent également de nouveaux aspects. Tout d'abord, il y a une volonté de maximiser un front uni contre la Chine. On voit ainsi un développement tous azimuts des relations économiques, politiques et surtout militaires avec le Vietnam, un renforcement d'ensemble des relations avec le Myanmar, la reprise des relations longtemps gelées avec le Laos. Le second aspect est la construction d'une structure stratégique avec les Etats-Unis comme le centre d'une gigantesque toile d'araignée. Le troisième consiste à poursuivre le déploiement en avant, mais aussi d'en étendre la profondeur stratégique. Par exemple en encourageant le développement de la puissance militaire du Japon, en déployant des navires de combat de type LCS à Singapour, en revenant à la base navale de Subic aux Philippines, en renforçant leur déploiement avancé en Asie de l'Est.
Quatrièmement, la différenciation économique. Les Etats-Unis font une promotion vigoureuse de l'Accord de Partenariat Stratégique Transpacifique (dit PPT), en excluant la Chine.
Dans le processus des États-Unis pour construire une nouvelle guerre froide en Asie-Pacifique, le Japon tient une place de choix en étant, d'une part, prêt à tenir le rôle de pion et de frontière stratégique des Etats-Unis, à être prêt à intervenir partout, et en bâtissant un réseau stratégique. De toute évidence, les relations stratégiques du Japon et des Etats-Unis portent préjudice à la Chine, mais cela au détriment des fruits de la victoire dans la guerre passée contre le fascisme, sapant l'ordre de l'après-guerre en Asie-Pacifique, mais miner ainsi les fondements politiques de la paix en Asie-Pacifique entraînera inévitablement des bouleversements de la situation dans cette région.
En fait, la majorité des pays d'Asie Pacifique sont opposés à une nouvelle guerre froide. Dans la volonté américaine de construire un modèle de nouvelle guerre froide, les pays comme le Japon sont très peu nombreux, la majorité des pays de l'Asie-Pacifique ne veulent pas choisir un camp, ils veulent prendre le moins de risques possibles, et souhaitent que les grandes puissances s'engagent dans une politique équilibrée, pour aboutir à un équilibre stratégique entre les grands pays de la région Asie-Pacifique, espérant ainsi renforcer le facteur sécurité et élargir leur espace de profit.
Bien sûr, la situation est extrêmement complexe, et les dangers potentiels nombreux. La région Asie-Pacifique n'est pas, pour les Etats-Unis, le seul centre d'intérêt stratégique, mais tout au moins est-elle pour eux le plus important. À l'heure actuelle, les Etats-Unis sont aussi engagés en Europe, au Moyen-Orient, en plus de l'Asie-Pacifique.
La région Asie-Pacifique est le centre de gravité géopolitique du monde, c'est pour la Chine la direction principale pour aller de l'avant, mais aussi la principale source de menaces extérieures. La situation géopolitique en Asie-Pacifique subit les changements les plus profonds et les plus complexes depuis la Seconde Guerre mondiale. La région Asie-Pacifique devrait sans aucun doute devenir le centre de la stratégie géopolitique mondiale. La période de transition entre l'ancien modèle et le nouveau dans la région Asie-Pacifique est marquée par l'incertitude et une certaine plasticité.
La situation géopolitique en Asie-Pacifique connait actuellement une évolution historique, et les aspects positifs et négatifs de ce processus sont étroitement liés, aigus et complexes. Les différentes puissances vont avoir à redéfinir leur position, et la formation d'un nouveau modèle passera par une lutte acharnée et des bouleversements pendant longtemps. La Chine devrait pleinement se donner les moyens de jouer un rôle pro-actif positif pour permettre d'encourager le développement de cette évolution dans la bonne direction.
Ren Weidong (chercheur à l'Institut chinois des relations internationales contemporaines)
Les Etats-Unis continuent d'accroître leurs forces dans l'océan Pacifique où sont déjà déployés 60 % de leurs sous-marins porteurs d'armes nucléaires.
Le renforcement du groupe américain dans la région a été projeté il y a quelques ans et l'océan Pacifique devient aujourd'hui l'arène de compétition entre les principales puissances mondiales. Moscou aussi accorde une attention soutenue à cette région.
Dissuasion et menace
Dans le monde moderne la zone du déploiement des forces principales des marines est un indicateur exact du climat politique. Pendant presque toute la période de la guerre froide les forces principales de la marine américaine étaient concentrées dans l'océan Atlantique et la Deuxième flotte américaine était le groupe naval le plus puissant. Sa composition était la plus forte jusqu'au milieu des années 1990, ensuite elle a été réduite et, en fin de compte, désactivée en 2011. La zone de responsabilité de la Deuxième flotte dans l'océan Atlantique a été partagée entre la Sixième flotte, opérationnelle en Méditerranée, et la Quatrième flotte qui contrôle les eaux baignant l'Amérique du Sud.
Dès cette époque, le gros des forces de la marine américaine a été déplacé vers l'océan Pacifique dans la zone de responsabilité de la Septième flotte. Les projets de concentration dans l'océan Pacifique ont été exposés publiquement en 2012 par le ministre de la Défense Leon Panetta selon lequel le rapport des forces souhaitable entre les océans Pacifique et Atlantique était de 60 à 40. L'US Navy est l'élément le plus souple dans l'arsenal des Etats-Unis qui accomplit les missions de dissuasion de l'ennemi en puissance et, parallèlement, crée des menaces. Dans l'océan Pacifique l'objet de ces actions est évident : c'est la Chine qui réalise un programme sérieux de renforcement de sa marine comprenant les projets de mise en place de quatre groupes de porte-avions. Le rapport des forces n'est point désastreux pour la Chine étant donné que les Etats-Unis se proposent d'avoir six porte-avions dans l'océan Pacifique dont une partie sera constamment détourné par le Golfe et, plus généralement, le Proche-Orient.
Le facteur de menace créé par la marine des Etats-Unis demeure d'ailleurs suffisamment considérable pour éliminer les tentatives pour remettre en cause la puissance navale américaine. Les Etats-Unis, pour leur part, cherchent à tirer profit de leur situation en mettant en place une composante navale du système d'ABM et en augmentant sa mobilité et sa flexibilité. La plupart des navires dotés de missiles intercepteurs SM-3 se trouvent déjà dans l'océan Pacifique.
Le temps pour la Russie
Il est nécessaire de retenir que la Russie joue un rôle secondaire dans la planification militaire américaine, sinon la plus grande partie des forces navales des Etats-Unis serait restée concentrée dans le nord de l'océan Atlantique et en Méditerranée. En Extrême-Orient, l'attention prioritaire est accordée à la Chine dont la puissance militaire et économique ne cesse de croître et à la Corée du Nord dont la menace tient à l'imprévisibilité et à la possession de l'arme nucléaire. C'est le facteur nord-coréen qui est à l'origine du déploiement dans la région d'un si grand nombre de navires américains dotés de systèmes d'ABM.
La même situation concerne également la Russie : dans la planification militaire russe les Etats-Unis ont perdu depuis longtemps le statut de l'adversaire le plus probable. En ce qui concerne l'océan Pacifique, la menace la plus réelle pour la Russie est une opération éventuelle du Japon cherchant à restituer les « territoires du nord ». Dans cette hypothèse le Japon doit exclure le soutien de la part des Etats-Unis: dans leur face-à-face avec la Chine ces derniers ont besoin d'une Russie amicale. La Russie, quant à elle, rétablit sa présence militaire en Extrême-Orient, le renforcement de la marine compris. Ces prochaines années, la flotte sera complétée par de nouveaux navires de guerre de classe corvette/frégate, de nouveaux sous-marins et navires de projection et de commandement de classe Mistral.
Les priorités de la flotte subissent également une évolution : la marine de Russie a abandonné la compétition directe avec les Etats-Unis se concentrant sur d'autres tâches, à savoir le renforcement de la défense des Kouriles et la lutte contre la piraterie. Dans le futur, la Russie va déployer la plupart de ses bâtiments de guerre dans l'océan Pacifique.
Pour Moscou, le gage principal du calme n'est plus la force des armes, mais de bonnes relations avec les leaders régionaux : l'Inde et la Chine. Dans ces conditions la Russie pourra développer sa flotte dans l'océan Pacifique sans que le programme soit menacé par des considérations de politique extérieure.
Sujet: Re: Asie-Pacifique : guerre froide Jeu 30 Jan 2014 - 22:50
Le Pacifique, une arène de compétition entre les leaders mondiaux, par Ilia Kramnik
jeudi, 30 janvier 2014 15:56
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Citation :
IRIB-Les Etats-Unis continuent d'accroître leurs forces dans l'océan Pacifique....
où sont déjà déployés 60 % de leurs sous-marins porteurs d'armes nucléaires.Le renforcement du groupe américain dans la région a été projeté il y a quelques années et l'océan Pacifique devient aujourd'hui une arène de compétition entre les principales puissances mondiales. Moscou aussi accorde une attention soutenue à cette région.
Dissuasion et menace
Dans le monde moderne la zone de déploiement des principales forces des flottes des pays leaders est un indicateur exact du climat politique. Pendant presque toute la période de la guerre froide les forces principales de la marine américaine étaient concentrées dans l'océan Atlantique et la Deuxième flotte américaine était le groupe naval le plus puissant. Sa composition était la plus forte jusqu'au milieu des années 1990, ensuite elle a été réduite et, en fin de compte, désactivée en 2011. La zone de responsabilité de la Deuxième flotte dans l'océan Atlantique a été partagée entre la Sixième flotte, opérationnelle en Méditerranée, et la Quatrième flotte qui contrôle les eaux baignant l'Amérique du Sud.
Dès cette époque, le gros des forces de la marine américaine a été déplacé vers l'océan Pacifique dans la zone de responsabilité de la Septième flotte. Les projets de concentration dans l'océan Pacifique ont été exposés publiquement en 2012 par le ministre de la Défense Leon Panetta selon lequel le rapport des forces souhaitable entre les océans Pacifique et Atlantique était de 60 à 40. L'US Navy est l'élément le plus souple dans l'arsenal des Etats-Unis qui accomplit des missions de dissuasion de l'ennemi en puissance et, parallèlement, crée des menaces. Dans l'océan Pacifique l'objet de ces actions est évident : c'est la Chine, qui réalise un programme sérieux de renforcement de sa marine comprenant les projets de mise en place de quatre groupes de porte-avions. Le rapport de forces n'est pas désastreux pour la Chine, étant donné que les Etats-Unis se proposent d'avoir six porte-avions dans l'océan Pacifique dont une partie sera constamment détourné par le Golfe et, plus généralement, le Proche-Orient.
Le facteur de menace créé par la marine des Etats-Unis demeure d'ailleurs suffisamment important pour éliminer les tentatives de remise en cause de la suprématie navale américaine. Les Etats-Unis, pour leur part, cherchent à tirer profit de leur situation en mettant en place une composante navale du système d'ABM et en augmentant sa mobilité et sa souplesse. La plupart des navires dotés de missiles intercepteurs SM-3 se trouvent déjà dans l'océan Pacifique.
La place de la Russie
Il est nécessaire de retenir que la Russie joue un rôle secondaire dans la planification militaire américaine, sinon la plus grande partie des forces navales des Etats-Unis serait restée concentrée dans le nord de l'océan Atlantique et en Méditerranée. En Extrême-Orient, l'attention prioritaire est accordée à la Chine dont la puissance militaire et économique ne cesse de croître et à la Corée du Nord dont la menace tient à son imprévisibilité et à la possession de l'arme nucléaire. C'est le facteur nord-coréen qui est à l'origine du déploiement dans la région d'un si grand nombre de navires américains dotés de systèmes d'ABM.
La même situation concerne également la Russie : dans la planification militaire russe les Etats-Unis ont perdu depuis longtemps le statut d'adversaire le plus probable. En ce qui concerne l'océan Pacifique, la menace la plus réelle pour la Russie est une opération éventuelle du Japon visant la restitution des « territoires du nord ». Dans cette hypothèse le Japon doit exclure le soutien de la part des Etats-Unis: dans son face-à-face avec la Chine ces derniers ont besoin d'une Russie amicale. La Russie, quant à elle, rétablit sa présence militaire en Extrême-Orient, renforcement de la marine compris. Ces prochaines années, la flotte sera complétée par de nouveaux navires de guerre de classe corvette/frégate, de nouveaux sous-marins et navires de projection et de commandement de classe Mistral.
Les priorités de la flotte subissent également une évolution : la marine russe a abandonné la compétition directe avec les Etats-Unis en se concentrant sur d'autres tâches, à savoir le renforcement de la défense des Kouriles et la lutte contre la piraterie. Dans le futur, la Russie va déployer la plupart de ses bâtiments de guerre dans l'océan Pacifique.
Pour Moscou, le gage principal de calme n'est plus la force des armes, mais de bonnes relations avec les leaders régionaux : l'Inde et la Chine. Dans ces conditions la Russie pourra développer sa flotte dans l'océan Pacifique sans que le programme soit menacé par des considérations de politique extérieure.